Paroles de maquis, la presse

Publié le par Philippe Chaudoir

Sur LibéLyon, un article sur la coopération  avec le Burkina Faso



20/06/2009

A Villeurbanne, les Burkinabés rêvent en grand

FEUILLETON DES INVITES - « On en prend plein la vue, plein les oreilles ! On ne voit pas ça chez nous ; ça nous ouvre de nouvelles perspectives…» Athanase Kabré, Alain Héma, Luis Marquès et Boniface Kagambéga, artistes burkinabés présents sur le festival Les Invites, se régalent de découvrir le travail des artistes de rue programmés à Villeurbanne. Depuis leur rencontre avec Patrice Papelard, directeur artistique des Invites, lors du festival Récréatrales de Ouagadougou en octobre 2008, un beau compagnonnage artistique s’est noué. « Ils sont aussi frappés que nous ! On s’est sentis d’emblée en affinités » raconte Patrice Papelard. De ce coup de foudre réciproque est née l’envie d’initier une coopération culturelle décentralisée entre Burkinabés et Villeurbannais qui prend d’ores et déjà plusieurs formes...

Athanase Kabré (La Compagnie Le Fil), Alain Héma (La Compagnie Théâtre Eclair) et Luis Marquès (La Compagnie L’Œil du Cyclone) sont depuis une douzaine de jours en résidence d’écriture aux Ateliers Frappaz. Ensemble, ils écrivent un spectacle sur les Indépendances – dont l’Afrique de l’Ouest s’apprête à célébrer le cinquantième anniversaire. « Ce sera un peu le contre-poids populaire du programme officiel, qui sera sans doute un peu langue de bois » promet Luis Marquès. Très librement inspiré du ton « plein d’humour et d’une fausse naïveté » de l’œuvre d’Ahmadou Kourouma, Le Soleil des indépendances, ce spectacle s’appellera « Indépenderrance ». « Nous travaillons sur deux orientations, dans le fond comme dans la forme : la déambulation et la manipulation » précise Athanase Kabré. « Oui, on voudrait que les spectateurs vivent dans leur chair, de façon interactive, toutes ces manipulations que les Africains ont vécu : la tristesse, l’émotion, les montées d’adrénaline, on y croit, on n’y croit plus… » poursuit Alain Héma.

Pour ces artistes burkinabés, la rencontre avec les Ateliers Frappaz est décisive : « Ils ont des capacités techniques que nous n’avons pas ; ils nous disent « rêvez et on verra comment on peut le faire ». Pour nous c’est énorme car souvent on bride notre créativité en fonction de la réalité de nos moyens » disent-ils en chœur. « Indépenderrance » devrait être créé en Afrique en juin 2010 et présenté aux Invites de Villeurbanne en juin 2011. Mais dès février 2010, une première étape de travail devrait être présentée lors de la première édition du festival « Rendez-vous chez nous » auquel tous sont associés.

Pour mettre sur pied ce festival des arts de la rue, qui se déploiera dans trois villages proches de Ouagadougou, Boniface Kagambéga suit actuellement un long stage rémunéré aux Ateliers Frappaz. « L’idée est d’aider au portage de ce projet autour d’une transmission des savoir faire » résume Philippe Chaudoir, président des Ateliers Frappaz. En immersion aux Invites et aux Ateliers Frappaz, Boniface Kagambéga engrange de nombreuses réponses, techniques ou autres, à ses nombreuses questions. Comment impliquer la population, et imaginer une création partagée entre artistes professionnels et habitants ? Comment développer un volet de formation ? Quelle aide financière peut-on trouver ?

Ce matin, un colloque se tient au square de la Doua sur le thème de la coopération décentralisée et du développement culturel, réunissant, principalement des acteurs de projets et des élus lyonnais et burkinabés, dont le maire de Ouagadougou. Boniface Kagambéga espère que ce temps d’échange permettra « d’ouvrir certaines portes et de nous accompagner dans le développement du festival ». Concepteur du colloque, Philippe Chaudoir espère de son côté que ce colloque permettra de « faire prendre conscience, au niveau local, de l’intérêt de soutenir ce type de coopérations entre acteurs culturels de terrain ». Il souhaite que, du côté burkinabé, les artistes trouvent des « facilitations » et que, du côté du Grand-Lyon, la collectivité engage un volet culturel aux programmes de coopération décentralisée pour l’instant centrés sur des urgences plus immédiatement vitales : eau potable, poubelles, recyclage, voieries, accès aux fluides, etc. Encore que tout soit lié… Car quand on interroge le « sage » Alain Héma sur les éventuelles spécificités d’un art de la rue africain, il répond cette évidence : « il n’y a pas de jus en Afrique ! » Frappé par le talent de la compagnie Carabosse, présente aux Invites, à « illuminer les villes », Boniface Kagambéga aimerait travailler avec eux car les trois villages qui accueilleront son festival n’ont, effectivement, pas l’électricité.

Anne-Caroline JAMBAUD

 

 

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